La guerre civile qui ravage le Soudan est entrée mardi dans sa troisième année, sans aucune issue en vue, après avoir fait des dizaines de milliers de morts, déraciné 13 millions de personnes et plongé dans la famine une partie du pays. Depuis deux ans, les combats acharnés entre l’armée et les paramilitaires ont laissé ce pays d’Afrique de l’Est profondément déchiré, où des millions de civils «continuent à faire les frais du mépris des deux parties pour la vie humaine», a averti le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.
La guerre a éclaté le 15 avril 2023 entre l’armée régulière sous le commandement du général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) dirigées par son ancien adjoint, le général Mohamed Hamdane Daglo. En quelques heures, la capitale, Khartoum, s’est transformée en champ de bataille. Des centaines de milliers de personnes ont fui, ceux qui sont restés ont dû lutter pour survivre.
Une situation humanitaire catastrophique
Témoignages de la population
«Je pèse moitié moins qu’au début de la guerre», a raconté à l’AFP Rafi Hussein, un homme de 52 ans qui a vécu pendant près de deux ans dans la capitale contrôlée par les FSR et reprise en mars par l’armée. À présent, «nous sommes en sécurité, mais nous souffrons toujours du manque d’eau et d’électricité et la plupart des hôpitaux ne fonctionnent pas», a-t-il ajouté. Beaucoup de civils ont célébré ce qui était pour eux une «libération» après les mois passés sous l’emprise des paramilitaires, accusés de génocide, de pillages et de violences sexuelles.
Offensives et réunions internationales
Mais les FSR poursuivent à présent leur offensive au Darfour, une vaste région de l’ouest du pays, frontalière du Tchad, qu’ils contrôlent presque totalement et où ils tentent de s’emparer d’El-Facher, la dernière capitale provinciale du secteur à leur échapper. Mardi, des responsables de pays d’Afrique et d’Europe se réunissent à Londres, en l’absence des deux parties soudanaises, avec l’objectif de mobiliser la communauté internationale pour mettre fin au conflit.
«Deux ans, c’est beaucoup trop long – la guerre brutale au Soudan a dévasté la vie de millions de personnes – et pourtant, une grande partie du monde continue de détourner le regard», a déploré le ministre britannique des Affaires étrangères David Lammy. «Continuer à détourner le regard du Soudan aura des conséquences catastrophiques», a déclaré le Haut-Commissaire de l’ONU aux réfugiés, Filippo Grandi. «Les Soudanais sont assiégés de toutes parts : guerre, exactions généralisées, indignité, faim et autres épreuves».
Bilan humain et sanitaire
La guerre a fait des dizaines de milliers de morts mais la destruction du système de santé rend impossible tout bilan exact. En 2024, l’ancien émissaire de l’ONU au Soudan, Tom Perriello, avait avancé certaines estimations faisant état de 150'000 morts. Les deux camps ont été accusés de viser des civils, de bombarder aveuglément des zones habitées et de faire obstacle à l’acheminement de l’aide humanitaire.
Près de 25 millions de Soudanais souffrent d’insécurité alimentaire aigüe, dont huit millions sont au bord de la famine. «Deux années de guerre et de déplacements ont brisé les vies de millions d’enfants à travers le Soudan», a déploré la directrice exécutive de l’Unicef, Catherine Russell.