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Voyeurisme dans les piscines parisiennes : la mairie lance une inspection


Après des témoignages de femmes filmées à leur insu, la mairie de Paris renforce la surveillance des vestiaires et la formation des agents.

Voyeurisme dans les piscines parisiennes : la mairie lance une inspection

Un message posté sur les réseaux sociaux par une journaliste racontant comment elle a été filmée dans les vestiaires d’une piscine parisienne a déclenché une avalanche de témoignages similaires, conduisant la mairie de Paris à lancer une «inspection» de ses installations. Ce sont les vestiaires de zones non mixtes qui sont ciblées par des agresseurs munis de caméras et qui n'étaient, jusqu'ici, pas suffisamment «pris au sérieux».

Un témoignage qui révèle une problématique plus large

La journaliste indépendante Laurène Daycard décrit sur son compte Instagram, le 2 avril, comment elle a surpris un homme en train de la filmer à son insu la veille pendant qu’elle se changeait dans une cabine de la piscine Georges Hermant dans le nord-est de Paris. «Alors que je me rhabillais, j’ai aperçu un sac à dos qui dépassait de la cabine voisine. J’ai repéré un petit trou derrière lequel se trouvait la lentille d’une smartphone», raconte la femme de 35 ans. Avec l’aide du personnel de la piscine, l’homme est arrêté et placé en garde à vue, décrit-elle. Elle a porté plainte.

Des témoignages similaires à travers la France

En faisant des recherches sur internet, elle découvre des faits divers similaires partout en France. Dans le sillage de son message, vu 217'000 fois, elle reçoit «plusieurs dizaines de témoignages» évoquant des agressions similaires dans des piscines de la capitale, et d’autres villes, et «des centaines de messages de soutien».

Des victimes se sentent non protégées

En avril 2024, dans une piscine parisienne, Théa Fourdrinier découvre dans la cabine voisine un homme qui l’«espionne en se masturbant». Retenu pendant 45 minutes, l’agresseur finit par s’enfuir en bousculant les agents municipaux, relate la jeune femme sur Instagram, estimant que «Paris ne [l]'a pas protégée». Clara, éditrice, se déshabillait quand elle aperçoit un smartphone glissé sous la paroi de la cabine d’une piscine à Belleville, à Paris.

En mars, j’ai appris que ma plainte était classée», indique-t-elle. Selon les témoignages reçus par Laurène Daycard, certaines femmes ont été sidérées et n’ont pas pu poursuivre l’agresseur. D’autres ont signalé les faits au personnel des piscines et à la police, qui ont banalisé, disant que ça arrivait souvent.

Un manque de formation pour réagir à ces situations

«La diversité des réactions dénote un manque de formation pour savoir comment réagir à ces situations», commente la journaliste, spécialisée dans les violences sexuelles et autrice de «Nos absentes: à l’origine des féminicides». Ce voyeurisme «semble fréquent, mais banalisé, invisibilisé, comme le sont souvent les violences sexistes et sexuelles, souvent confinées aux rubriques faits divers alors qu’il s’agit de faits de société», commente-t-elle. «Que deviennent ces vidéos?» s’interroge-t-elle, pointant le risque qu’elles soient partagées sur internet.

Mesures prises par la mairie de Paris

Suite aux témoignages reçus, les vestiaires feront l’objet d’une «inspection systématique» chaque soir «pour détecter d’éventuels aménagements ou trous pouvant favoriser des actes de voyeurisme.» La mairie annonce aussi un «renforcement de la formation des agents à la surveillance, prévention et à l’accueil de la parole des victimes».

Réactions des utilisatrices des piscines

Clara confie être désormais «hypervigilante dans les vestiaires» qui sont «devenus mixtes dans la plupart des piscines parisiennes». «Celles qui gardent des vestiaires hommes-femmes séparés sont un havre de paix, il n’y a pas d’inquiétude». «S’il faut en arriver à mettre en place des espaces non mixtes dans les vestiaires pour que ça n’arrive plus, alors faisons-le», avance une nageuse.

L’homme soupçonné d’avoir filmé Laurène Daycard est mis en examen pour «voyeurisme aggravé» et sera jugé mi-juin, précise Laurène Daycard. Il encourt deux ans de prison et 30'000 euros d’amende.