Dans les Hauts-de-France, deux cadres de Domino’s Pizza sont accusés d’avoir orchestré un système de détournement de recettes pour un préjudice de 1,6 million d'euros. Ce vendredi, ils étaient jugés à Béthune (Pas-de-Calais), où le procureur a requis contre chacun 4 ans de prison, dont 2 ans avec sursis, ainsi que des amendes de 300'000 euros pour le premier prévenu et 50'000 euros pour le second. Le jugement sera rendu le 30 avril.
Les deux mis en cause comparaissaient pour escroquerie, blanchiment d’argent et travail dissimulé en bande organisée, ainsi que pour participation à une association de malfaiteurs et subornation de témoins. On leur reproche d’avoir détourné plus de 1 million d’euros de recettes, en annulant dans les comptes des commandes honorées, encaissées en espèces ou titres restaurant.
Un système de fraude bien huilé
L'enquête et les révélations
L’enquête a été ouverte en 2022, après qu’un ex-salarié a dénoncé un système de fraude organisée dans le restaurant Domino’s Pizza de Béthune: chaque semaine, le gérant aurait eu l’ordre d’annuler 500 euros de commandes payées et livrées, puis de mettre l’argent détourné dans une enveloppe pour les remettre au superviseur. Les investigations ont ensuite révélé que ce mode opératoire aurait été utilisé dans au moins six restaurants franchisés de la région.
Les accusations et les défenses
Le préjudice total, incluant les cotisations sociales non payées à l’Urssaf et le manque à gagner pour la société mère Domino’s Pizza France – partie civile au procès – s’élèverait à 1,57 million d’euros. Agé de 42 ans, le superviseur, qui aurait indûment touché environ 300 euros par mois, a reconnu avoir participé à l’escroquerie mais a affirmé avoir «exécuté bêtement» les ordres, car la fraude était selon lui «déjà en place» avant son arrivée en 2016.
A contrario, le propriétaire, 61 ans, a déclaré avoir remis ce système en place à la demande du superviseur, qui aurait «refusé une augmentation salariale» pour «continuer à toucher des prestations sociales». Le propriétaire aurait aussi profité de la combine pour payer des travaux dans ses restaurants, ainsi que dans l’une de ses maisons dans le sud de France.
Les arguments des prévenus
Les prévenus ont tous deux nié avoir tenté de faire porter le chapeau à un ancien gérant du restaurant de Béthune, tout en admettant y avoir songé. Leurs avocats ont notamment demandé le retrait de la circonstance aggravante de bande organisée. Selon le propriétaire des franchises, «Domino’s Pizza France était au courant de la situation», une allégation réfutée par l’entreprise.
Commandes livrées mais annulées
Les commandes étaient livrées et payées, mais ensuite annulées dans les comptes, permettant ainsi de détourner les fonds. Ce système complexe a permis aux deux cadres de s'enrichir illégalement pendant plusieurs années.
Deux versions qui s'opposent
Les versions des deux prévenus s'opposent, chacun rejetant la responsabilité sur l'autre. Le superviseur affirme avoir suivi des ordres déjà en place, tandis que le propriétaire déclare avoir agi sous la pression du superviseur. La vérité sera déterminée par le tribunal lors du jugement final.
Cette affaire met en lumière les risques de fraude dans le secteur de la restauration rapide et la nécessité de mécanismes de contrôle rigoureux pour prévenir de tels détournements.