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Le lancement d'Ariane 6 reporté en raison d'une anomalie


La fusée devait emporter un satellite militaire français. Le patron d'Arianespace évoque un report prochain.

Le lancement d'Ariane 6 reporté en raison d'une anomalie

Dans la nuit de dimanche à lundi, le portique s'était retiré et Ariane 6 s’est dévoilée sur son pas de tir à Kourou. Cependant, la fusée qui devait emporter dans l’espace un satellite militaire français pour sa première mission commerciale n'a pas décollé lundi en raison d’une «anomalie au sol». «La seule décision possible maintenant est de repousser le lancement» qui «n’aura pas lieu aujourd’hui», a déclaré le patron d’Arianespace David Cavaillolès, trente minutes avant le décollage prévu à 17h24 (en Suisse). «Je n’ai pas de doute que nous repartirons en vol prochainement», a-t-il ajouté.

Initialement prévu en décembre, la mission a été reportée au 26 février, puis à lundi, une pratique courante dans le secteur spatial. «Tous les lancements sont à risques», avait déclaré la semaine dernière Lionel Suchet, PDG par intérim du Cnes, agence spatiale française. «Quels que soient le passager (le satellite embarqué) ou la maturité du lanceur, c’est toujours quelque chose de compliqué et de délicat qui peut très rapidement mal se terminer», avait pour sa part prévenu Carine Leveau, directrice du transport spatial au Cnes.

Une mission hautement symbolique

Souveraineté spatiale européenne

Cette mission, hautement symbolique, visait à sceller la souveraineté retrouvée de l’Europe spatiale dans un contexte du rapprochement entre les Etats-Unis et la Russie. Les turbulences géopolitiques étaient lundi dans tous les esprits. «Nous devons être unis», avait lancé le nouveau patron d’Arianespace David Cavaillolès à l’intention des alliés européens, au cours d’une conférence de presse à Kourou avant le report du lancement, en soulignant l’importance de «ne dépendre de personne» pour le lancement des satellites «dans le monde d’aujourd’hui».

Concurrence et autonomie stratégique

Philippe Baptiste, ministre de la Recherche et ancien patron du Cnes, a dit s’attendre à «des coups de boutoir» pour les lanceurs et les satellites de la part d’Elon Musk, qui a déjà chamboulé l’environnement spatial avec SpaceX et a renforcé sa puissance en devenant un membre de l’administration de Trump. Dans ce contexte, «le concept d’autonomie stratégique, un temps moqué comme une lubie française, est au cœur de l’Europe de demain», a-t-il déclaré dans une interview à «La Tribune». «Le nombre de lancements a explosé, non seulement américains, mais aussi chinois. Nous devons garder notre place», a fait valoir à Kourou le général Jérôme Bellanger, chef de l’Etat-major de l’armée de l’air et de l’espace.

Le satellite CSO-3

Le satellite CSO-3, qui sera placé sur une orbite à 800 kilomètres, va compléter la mini-constellation de surveillance de la Terre pour le ministère français de la Défense et améliorera ses capacités de renseignement. Il attend depuis 2022 d’être lancé; les deux premiers satellites CSO-1 et CSO-2 déjà positionnés avaient été envoyés en 2018 et 2020 par des Soyouz russes.

Capacités spatiales en Europe

En Europe, seules la France et l’Italie disposent de satellites militaires, a détaillé Bertrand Denis, vice-président chargé de l’observation de la Terre de la coentreprise franco-italienne Thales Alenia Space, qui fabrique l’instrument optique pour les CSO. Les Etats-Unis comme la Chine comptent «des centaines» de satellites militaires ou civils et militaires, a dit Philippe Steininger, auteur du livre «Révolutions spatiales» et consultant du Cnes.

Accès autonome à l'espace

Après le vol inaugural réussi d’Ariane 6 en juillet, ce premier lancement embarquant un satellite commercial devait sécuriser l’accès autonome de l’Europe à l’espace dont elle a été privée pendant plusieurs mois, ne pouvant plus disposer de Soyouz depuis l’invasion de l’Ukraine en 2022. L’autre fusée européenne légère, Vega-C, n’a repris les vols qu’en décembre 2024, après avoir été immobilisée pendant deux ans dans la foulée d’un accident ayant entraîné la perte de satellites.

Turbulences géopolitiques

Les turbulences géopolitiques actuelles ajoutent une couche de complexité aux défis spatiaux. La nécessité de maintenir une souveraineté spatiale devient cruciale pour l'Europe, qui doit naviguer entre les ambitions spatiales croissantes des États-Unis et de la Chine. La coopération entre les pays européens reste essentielle pour garantir un accès autonome et sécurisé à l'espace.

Satellites militaires

Les satellites militaires jouent un rôle crucial dans la surveillance et le renseignement. Le satellite CSO-3, une fois en orbite, renforcera les capacités de la France en matière de surveillance de la Terre. Ce type de mission est essentiel pour maintenir la sécurité nationale et répondre aux défis géopolitiques actuels.

En conclusion, malgré le report du lancement d'Ariane 6, la mission reste d'une importance capitale pour l'Europe spatiale. La souveraineté et l'autonomie stratégique sont des enjeux majeurs dans un contexte de concurrence accrue et de turbulences géopolitiques. L'Europe doit continuer à investir et à innover pour maintenir sa position sur la scène spatiale mondiale.