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Des cigognes s'installent sur un centre d'enfouissement en Alsace


Plus d'une centaine de cigognes hivernent sur un site de déchets à Wintzenbach, bénéficiant de ressources alimentaires disponibles toute l'année.

Des cigognes s'installent sur un centre d'enfouissement en Alsace

À Wintzenbach, non loin de la frontière allemande, plusieurs dizaines de cigognes évoluent au sommet d'un vaste centre d'enfouissement, loin de l'image idyllique du bel échassier noir et blanc perché sur la cheminée d'une jolie maison à colombages et annonciateur d'une naissance. Malgré le froid vif d'un matin de février, elles se gavent. «Ça fait quelques années que régulièrement, en hiver, je compte à peu près une centaine de cigognes présentes sur le site», témoigne à l'AFP Charles Helbling, bénévole de la Ligue de protection des oiseaux (LPO). Sur ce total, difficile de savoir combien de cigognes viennent de rentrer de leur migration hivernale et combien n'ont pas du tout quitté le secteur. Surtout que pour certains spécimens, l'Alsace, c'est déjà le sud. Sur une cigogne récemment observée, «ils ont pu lire la bague à sa patte et c'était une cigogne qui venait d'Allemagne du Nord et s'est arrêtée ici», raconte Charles Helbling.

Quasiment disparue dans les années 1970, la cigogne blanche a bénéficié d'une politique de protection et voit ses effectifs s'envoler. La LPO a dénombré 1634 couples nicheurs l'an dernier, soit un doublement de la population en l'espace de dix ans, car les cigognes sont de moins en moins nombreuses à effectuer la migration qui les emmène traditionnellement par-delà la Méditerranée, sur des milliers de kilomètres.

Des migrations moins longues

Des retours plus précoces

Celles qui partent le font plus tard et reviennent plus tôt. «On les revoit deux-trois semaines plus tôt en Alsace. Avant, elles rentraient vers la mi-février. Maintenant, certaines sont de retour dès la mi-janvier», expose Yves Muller, président de la LPO Alsace.

Des destinations plus proches

«Auparavant, elles allaient jusqu'en Afrique équatoriale. Mais depuis quelques décennies, elles partent seulement autour de la Méditerranée: dans le sud de la France, au Maroc ou en Espagne», relève-t-il. «Comme les cigognes partent moins loin, il y a moins de risques et la mortalité diminue». Selon lui, le changement climatique est à l'origine de ce bouleversement, car les cigognes peuvent plus facilement gober toute l'année les 300 vers de terre qu'elles avalent volontiers chaque jour.

Des ressources alimentaires disponibles

«Autrefois, en hiver, il faisait très froid en Alsace. Les cigognes ne trouvaient pas à manger, car tout était gelé. Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui: elles trouvent ce dont elles ont besoin dans des décharges en plein air», dit-il. Yves Muller ne sait pas vraiment ce qu'elles y mangent: «Mais si elles y sont, c'est qu'il y a forcément quelque chose qui les intéresse, comme des rongeurs».

La question interpelle Michaël Gruny, directeur du Smictom Nord Alsace, qui gère le centre d'enfouissement de déchets non recyclables de Wintzenbach. Selon lui, le site n'enfouit plus d'ordures ménagères depuis 2017 et a une obligation de dératisation. Il assure donc que les déchets enfouis sur place ne sont pas toxiques et ne menacent pas en principe la vie des cigognes. Mais pour Charles Helbling, de la LPO, les cigognes «peuvent aussi ingérer des substances et des produits qui ne sont pas bons», comme des sacs en plastique ou des élastiques. Il reconnaît cependant n'avoir pas retrouvé de cigognes mortes à proximité du site.

Des naissances précoces

Avec cette présence précoce des cigognes en hiver en Alsace, l'animal a aussi tendance à s'accoupler plus tôt et les cigogneaux à naître avant les beaux jours. Des naissances fatales l'an dernier à nombre d'oisillons, victimes d'intempéries début mai alors que leurs plumes n'étaient pas encore étanches. «Des cigogneaux qui venaient de naître ont été tués par la grêle», rapporte Raphaël Picard, chargé de communication à Cigoland, un parc de loisirs du Bas-Rhin qui accueille plus d'une centaine de cigognes aux beaux jours.