La Turquie commémore jeudi le tremblement de terre du 6 février 2023, qui a englouti près de 60'000 vies et transformé des villes entières en champs de ruines. Dès 4h17 (2h17 en Suisse), l’heure exacte de la secousse d’une magnitude de 7.8, les proches des victimes et les rescapés se sont retrouvés dans plusieurs villes dévastées, dont Adiyaman et Antakya dans le sud-est du pays, la vieille Antioche particulièrement meurtrie, pour se souvenir de ces terribles minutes qui ont emporté leur vie.
Le séisme, ressenti jusqu’en Égypte, a fait s’écrouler des milliers d’immeubles dans un grand quart sud-est de la Turquie, prenant au piège en pleine nuit leurs habitants endormis. «Deux ans ont passé mais c’est toujours la même émotion, nous la vivons comme au premier jour. Rien n’a changé», confie à l’AFP Emine Albayrak, 25 ans qui s’est jointe au rassemblement d’Antakya.
Deux ans après, la reconstruction en cours
Témoignages poignants des rescapés
«Ça fait deux ans mais c’est comme si c’était hier. La vie continue, mais comment?», lâche Hümeysa Bagriyanik, 18 ans. «Je me sens étrangère dans ma propre ville, elle est rasée, je ne reconnais rien, aucune des rues que j’emprunte».
Des incidents ont éclaté dans Antakya, traditionnellement frondeuse, quand la foule qui voulait avancer vers le centre-ville a été bloquée par les barricades et les charges de la police. Selon les médias locaux, trois personnes ont été arrêtées. «Vous nous envoyez du gaz, allez-vous aussi arroser nos morts?» a crié la foule en colère, en réclamant la «démission du gouvernement».
Message du président Erdogan
Dans un message posté sur X à 4h17 exactement, le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a qualifié le drame de «catastrophe du siècle», a appelé ses concitoyens à la «patience»: «Je prie Dieu d’avoir pitié de chacun de nos 53'537 frères et sœurs perdus. Je souhaite encore une fois patience aux familles et à notre nation».
Le chef de l’État qui se rendra à Adiyaman dans la journée, promet aussi de poursuivre les efforts de construction «avec beaucoup de travail, de sueur, de courage et une volonté d’acier jusqu’à ce que nos villes soient pleinement rétablies».
Situation des sinistrés
Deux ans après, 670'000 personnes vivent toujours dans des conteneurs, attendant pour beaucoup d’être tirées au sort pour pouvoir emménager dans des appartements construits par l’État. Près de 201'500 nouveaux logements ont été livrés dans la vaste région affectée par le séisme, et plus de 220'000 autres doivent l’être encore d’ici la fin de l’année, selon le ministère de l’Urbanisme.
«Partout où je vais, le premier endroit que je regarde est le plafond. Je me demande s’il s’effondrera et si je resterai coincée sous les décombres», a confié à l’AFP Sema Genç, 34 ans, une rescapée relogée de la province d’Hatay. Unique survivante de sa famille, elle se dit toujours «en colère» contre l’entreprise qui a construit son ancien immeuble, qui s’est écroulé sur elle et ses proches.
Poursuites judiciaires
À ce jour, 189 personnes, reconnues pour beaucoup coupables de «négligences» dans la construction des bâtiments, ont été condamnées à des peines de prison. Et 1'342 procès impliquant 1'850 prévenus sont en cours, selon le ministère turc de la Justice.
La reconstruction et la justice restent des priorités pour la Turquie, qui continue de panser ses plaies deux ans après ce séisme dévastateur.