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Témoignage inédit d'un juif des fours crématoires d'Auschwitz


80 ans après, les cahiers d'Alter Fajnzylberg révèlent son quotidien au sein des Sonderkommandos. Un document poignant préfacé par Serge Klarsfeld.

Témoignage inédit d'un juif des fours crématoires d'Auschwitz

Un livre poignant, qui paraît ce vendredi, reprend le témoignage, 80 ans plus tard, d'un jeune juif polonais employé aux fours crématoires entre juillet 1943 et janvier 1945. «J'ai vu ici sur Terre un enfer spécial»: il aura fallu attendre 80 ans pour que paraissent les cahiers où Alter Fajnzylberg relate son quotidien à Auschwitz-Birkenau en tant que membre des «Sonderkommandos», ces prisonniers juifs employés aux fours crématoires. Préfacé par Serge Klarsfeld, «Ce que j'ai vu à Auschwitz - Les Cahiers d'Alter» (éd. Seuil), qui paraît ce vendredi, est le témoignage que ce jeune Polonais issu d'une famille juive avait consigné à la Libération dans quatre cahiers, reproduits en fac-similé et traduits en français.

Le témoignage inédit d'un employé juif des fours crématoires

Un témoignage exceptionnel

Le Sonderkommando, où il restera de juillet 1943 à janvier 1945, «s'occupait de brûler les corps des personnes gazées à Auschwitz», explique Alter Fajnzylberg, qui raconte aussi son engagement dans la résistance et la révolte du Sonderkommando en octobre 1944, puis son évasion pendant l'évacuation en janvier 1945.

La lecture est souvent éprouvante sur ce travail «ignoble et inhumain», dans un camp où «plusieurs millions de personnes ont été brûlées sans être enregistrées». Il résume ainsi sa démarche: «Qui se souviendra d'eux, sinon moi?» Ces cahiers «s'inscrivent dans un corpus de témoignages extrêmement restreint», explique l'historien Alban Perrin dans cet ouvrage enrichi d'éléments biographiques et de témoignages antérieurs d'Alter Fajnzylberg devant des commissions de recherche.

La survie et la résistance

En effet, les Sonderkommandos, témoins de la «solution finale», étaient régulièrement éliminés par les nazis. Alter Fajnzylberg survivra «par miracle» aux exécutions et au désespoir, ayant compris que «se suicider n'empêcherait en rien» les nazis de poursuivre et que «seule la lutte organisée» pouvait être efficace.

L'acte le plus célèbre de cette résistance est peut-être les trois emblématiques photographies prises en 1944 à Birkenau, montrant des corps devant des fosses fumantes et des femmes nues avant leur probable exécution. Elles ont longtemps été considérées comme anonymes ou mal attribuées. Alter Fajnzylberg explique les avoir prises «avec d'autres camarades», lui-même transmettant la pellicule pour la faire sortir du camp. Et son témoignage permet d'attribuer à Alberto Errera, un juif grec, la paternité des photos elles-mêmes.

Un hommage à un homme au destin hors du commun

L'ouvrage est également un hommage à un homme au destin hors du commun, né en 1911 en Pologne et mort en 1987 à Paris, combattant en Espagne dans les Brigades internationales et déporté à Auschwitz en mars 1942 dans le premier convoi de France. Son témoignage, écrit en 1945-46, est longtemps resté enfermé dans une boîte à chaussures. «Elle m’attendait et je n'osais pas l’affronter», explique à l'AFP son fils unique, Roger Fajnzylberg, qui finira par ouvrir les cahiers en 2005 et par les faire traduire.

Des photos emblématiques

Les trois photographies prises en 1944 à Birkenau sont devenues des symboles de l'horreur des camps de concentration. Elles montrent des scènes poignantes de la réalité du camp, capturées par Alter Fajnzylberg et ses camarades. Ces images, longtemps considérées comme anonymes, ont finalement été attribuées à Alberto Errera grâce au témoignage d'Alter Fajnzylberg.

Ces photos, bien que douloureuses à regarder, sont des témoignages visuels précieux de l'histoire. Elles rappellent l'importance de ne jamais oublier les atrocités commises pendant l'Holocauste et de continuer à honorer la mémoire des victimes.

En conclusion, «Ce que j'ai vu à Auschwitz - Les Cahiers d'Alter» est un document historique inestimable qui nous rappelle l'importance de la mémoire et de la résistance face à l'oppression. Le témoignage d'Alter Fajnzylberg, bien que difficile à lire, est un devoir de mémoire pour les générations futures.