Presque tous les présidents sud-coréens ont mal fini. Assassinat, suicide, condamnation à mort, renversement, emprisonnement: ils ne sont que trois à avoir échappé à la série noire qui frappe les présidents sud-coréens. Emprisonnement, renversement, assassinat, condamnation à mort, suicide: avant Yoon Suk-yeol, arrêté mercredi après avoir été destitué par le Parlement mi-décembre, presque tous les présidents sud-coréens ont mal fini. Il n'y a guère que Moon Jae-in (2017-2022), Kim Young-sam (1993-1998) ou encore le prix Nobel de la paix Kim Dae-jung (1998-2003), artisan d'un rapprochement avec la Corée du Nord, qui ont paisiblement exercé et terminé leurs mandats.
La Destitution de Yoon Suk-yeol
Le 15 janvier 2025, les enquêteurs anti-corruption et les forces de police prennent d'assaut la résidence présidentielle et arrêtent Yoon Suk-yeol, qui refuse de répondre aux convocations de la justice. Le dirigeant, au pouvoir depuis 2022, doit répondre d'accusations de «rébellion», un crime théoriquement passible de la peine de mort, pour avoir tenté d'instaurer la loi martiale dans la nuit du 3 au 4 décembre et envoyé l'armée au Parlement pour museler celui-ci. Pour ce coup de force, le Parlement a voté le 14 décembre 2024 la destitution de Yoon Suk-yeol et un président intérimaire a été nommé. La procédure de destitution est en cours d'examen par la Cour constitutionnelle.
Présidents Destitués et Emprisonnés
Le 9 décembre 2016, la présidente Park Geun-hye, au pouvoir depuis 2013, est destituée par le Parlement, puis inculpée et incarcérée. La première femme présidente de Corée du Sud, qui se présentait comme incorruptible, est accusée d'avoir reçu des dizaines de millions de dollars des conglomérats sud-coréens, dont Samsung, d'avoir partagé des documents classifiés, d'avoir mis sur une «liste noire» des artistes critiques de sa politique ou encore d'avoir limogé des responsables qui s'opposaient à ses abus de pouvoir.
La fille de l'ex-dictateur Park Chung-hee est définitivement condamnée en 2021 à 20 ans de prison et à de lourdes amendes. Mais elle est graciée en décembre 2021 par son successeur, Moon Jae-in. Yoon Suk-yeol, aujourd'hui en disgrâce, a joué un rôle clé, en tant que procureur de Séoul, dans sa destitution puis son incarcération.
Au pouvoir de 2008 à 2013, Lee Myung-bak est condamné en octobre 2018 à 15 ans de prison pour corruption. Il est notamment reconnu coupable d'avoir touché des pots-de-vin de Samsung pour gracier le président du conglomérat, Lee Kun-hee, qui avait été condamné pour évasion fiscale. Il est gracié par le président Yoon Suk-yeol en décembre 2022.
Suicides et Condamnations
Président de 2003 à 2008, Roh Moo-hyun se suicide en se jetant du haut d'une falaise en mai 2009. Il était visé par une enquête sur le versement par un riche fabricant de chaussures d'un million de dollars à son épouse et de cinq millions de dollars au mari d'une de ses nièces.
En mars 2004, le Parlement avait adopté une motion de destitution sans précédent qui suspendait Roh Moo-hyun de ses fonctions, mais la Cour constitutionnelle avait invalidé la procédure deux mois plus tard.
Dictateurs et Coups d'État
Roh Tae-woo, élu après le départ de l'autocrate Chun Doo-hwan qu'il avait aidé à accéder au pouvoir, dirige la Corée du Sud de 1988 à 1993. En 1996, il est condamné à 22 ans de prison pour corruption et trahison. Il est amnistié deux ans plus tard et meurt d'une leucémie en novembre 2021, à l'âge de 88 ans.
Confronté à des manifestations pro-démocratie, Chun Doo-hwan, surnommé le «Boucher de Gwangju» pour avoir ordonné une sanglante répression dans cette ville du sud-ouest à son arrivée au pouvoir en 1980, passe la main à Roh Tae-woo en 1987. En 1996, il est condamné à la peine de mort, par la suite commuée en prison à vie, au cours du même procès que celui de son successeur Roh. Lui aussi est amnistié en 1998 après seulement deux ans derrière les barreaux. Il meurt lui aussi d'une leucémie en novembre 2021, quelques jours après son successeur, Roh Tae-woo.
Le dictateur Park Chung-hee est tué d'une balle dans la tête en octobre 1979 par son principal officier de renseignement à l'issue d'un banquet. Onze ans plus tôt, il avait échappé à une tentative d'assassinat par un commando nord-coréen infiltré dans Séoul.
Chun Doo-hwan et Roh Tae-woo, alors des généraux de l'armée, mettent à profit la confusion politique qui suit pour fomenter un coup d'État en décembre 1979. Chun Doo-hwan devient président en 1980 après le massacre de Gwangju et après avoir obtenu la démission du nouveau président Choi Kyu-ha.
Le président Yoon Bo-sun est renversé en 1961 par un coup d'État mené par le général Park Chung-hee, père de la future présidente Park Geun-hye. Park Chung-hee maintient le président Yoon Bo-sun à son poste provisoirement, puis le remplace lorsqu'il démissionne en mars 1962. Il exercera un pouvoir autoritaire jusqu'à son assassinat en 1979.
Le premier président de la Corée du Sud, Syngman Rhee, élu en 1948, est contraint à la démission par une insurrection populaire menée en 1960 par des étudiants, après avoir tenté de prolonger son mandat grâce à des élections truquées. Il s'exile à Hawaï (États-Unis), où il meurt en 1965.
Résumé des Fins Tragiques
- Yoon Suk-yeol: destitué
- Park Geun-hye: destituée, emprisonnée
- Lee Myung-bak: 15 ans de prison
- Roh Moo-hyun: suicide
- Roh Tae-woo: 22 ans de prison
- Chun Doo-hwan: condamné à mort
- Park Chung-hee: assassiné
- Yoon Bo-sun: renversé
- Syngman Rhee: renversé et exilé
Ces exemples montrent à quel point la fonction de président en Corée du Sud est marquée par des fins tragiques et des destins chaotiques. Les présidents sud-coréens semblent souvent confrontés à des défis insurmontables qui les mènent à des fins dramatiques.