Confrontée aux attaques frontales d’Elon Musk et Mark Zuckerberg, désormais alignés sur Donald Trump, l’Union européenne, qui a dû réfuter mercredi des accusations de «censure», doit démontrer qu’elle a les moyens législatifs et la volonté politique de résister à la «big tech» américaine. Or, depuis l’élection de Donald Trump aux États-Unis, tenant d’une ligne dure contre l’Europe, l’exécutif bruxellois semble soucieux de ne pas froisser son allié américain, tandis que Meta (Facebook, Instagram) a rejoint X mardi dans sa croisade contre les règlements européens. Le silence de la présidente Ursula von der Leyen, certes immobilisée chez elle par une pneumonie, mais aussi de ses commissaires, était assourdissant ces derniers jours.
Le patron de Meta, dans un mouvement de rapprochement vers Trump et ses soutiens, a annoncé qu’il mettait fin au «fact-checking» au sein de son groupe aux États-Unis, sans incidence en Europe pour l’instant. Un tel recours à des vérificateurs indépendants n’est pas une obligation dans l’UE, mais c’est un engagement volontaire qui peut être pris en compte par le régulateur parmi les efforts des plateformes pour réduire les risques de manipulation de l’information.
De son côté, Elon Musk multiplie les provocations sur X en s’invitant dans les débats politiques au Royaume-Uni et en Allemagne. Le milliardaire, proche de Donald Trump, participera jeudi à une conversation avec la dirigeante du parti d’extrême droite allemand, AfD, retransmise sur X, à un mois et demi des élections législatives.
La Réponse de l'Union Européenne
Silence Assourdissant de von der Leyen
La porte-parole de Mme von der Leyen, Paula Pinho, a justifié mardi son mutisme par la volonté de ne pas donner plus de visibilité aux messages problématiques. «En réagissant, on nourrit aussi le débat, le choix politique pour l’instant est de ne pas nourrir encore ce débat», a-t-elle affirmé.
Réaction Courroucée de Paris
Cette apparente passivité a suscité une réaction courroucée de Paris. Le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a exhorté Bruxelles mercredi à protéger les États membres de l’UE contre les ingérences dans le débat public européen. «Soit la Commission européenne applique avec la plus grande fermeté les lois que nous nous sommes données pour protéger notre espace public, soit elle ne le fait pas et alors il faudra qu’elle consente à rendre aux États membres de l’UE la capacité de le faire», a-t-il lancé.
Pas d'Attaque Frontale contre Trump
«Il y a sans doute une volonté de ne pas s’attaquer frontalement à Trump et Musk, parce qu’on a peur des réactions», estime Alexandre de Streel, expert des législations numériques pour le Center on regulation in Europe (Cerre). «Si la Commission ouvrait une procédure contre Musk ça mettrait plus que de l’huile sur le feu», constate aussi Umberto Gambini, partenaire de la société de consultants Forward Global, spécialisée dans les affaires européennes.
Selon plusieurs sources, le cabinet von der Leyen a gelé récemment l’annonce d’une amende contre Apple pour pratiques anticoncurrentielles par souci de ne pas nuire aux liens transatlantiques.
Enquête contre X
Une enquête a été ouverte contre X en décembre 2023. Mais aucune mise en cause formelle n’a encore été annoncée sur les soupçons de manipulation des algorithmes qui rendraient plus visibles les messages de Musk ou de l’extrême droite.