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Macron et Merz craignent une trahison américaine de l'Ukraine


Lors d'un appel confidentiel, Macron évoque un risque de concessions territoriales sans garanties. Merz met en garde Zelensky contre Washington.

Macron et Merz craignent une trahison américaine de l'Ukraine

Les tensions diplomatiques s'intensifient entre les capitales européennes et Washington concernant l'avenir de l'Ukraine. Selon des révélations de l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, plusieurs dirigeants européens auraient exprimé lors d'un appel téléphonique confidentiel leurs craintes que les États-Unis ne sacrifient les intérêts ukrainiens au profit d'un accord favorable à Moscou. Cette inquiétude marque un tournant dans les relations transatlantiques et soulève des questions cruciales sur l'unité occidentale face à l'agression russe.

L'administration de Donald Trump multiplie les initiatives pour négocier la fin du conflit en Ukraine, mais ces démarches suscitent une méfiance croissante chez les alliés européens. Les propos rapportés par Der Spiegel révèlent une fracture préoccupante au sein du camp occidental, alors que la guerre entre dans sa quatrième année.

Des dirigeants européens sonnent l'alarme

Lors d'un entretien téléphonique organisé lundi dernier avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky et plusieurs homologues européens, le président français Emmanuel Macron n'a pas mâché ses mots. Selon les notes consultées par Der Spiegel, il aurait déclaré qu'"il existe un risque que les États-Unis trahissent l'Ukraine sur la question des territoires sans qu'il y ait de garantie claire en matière de sécurité".

Cette déclaration, rapportée en anglais par l'hebdomadaire allemand et transmise à l'AFP, témoigne d'une profonde inquiétude quant aux véritables intentions de Washington. Le chef de l'État français craint manifestement que l'administration Trump ne soit prête à accepter des concessions territoriales ukrainiennes sans contrepartie solide en termes de sécurité pour Kiev.

Le chancelier allemand met en garde Zelensky

Le chancelier allemand Friedrich Merz, également cité dans l'article du Spiegel, aurait adopté un ton encore plus direct. S'adressant à Volodymyr Zelensky, il l'aurait exhorté à "faire très attention dans les prochains jours". Plus inquiétant encore, Merz aurait affirmé que les Américains "se jouent de vous et de nous", selon les sources du magazine allemand.

Ces propos, s'ils sont confirmés, révèlent une rupture de confiance significative entre Berlin et Washington. L'Allemagne, traditionnellement soucieuse de préserver les relations transatlantiques, semble désormais remettre en question la bonne foi américaine dans les négociations avec la Russie.

Une méfiance partagée par d'autres leaders européens

Le président finlandais Alexander Stubb aurait également exprimé sa défiance lors de cet appel confidentiel. Selon Der Spiegel, il aurait déclaré : "Nous ne pouvons pas laisser l'Ukraine et Volodymyr seuls avec ces types", faisant référence à Steve Witkoff, l'envoyé spécial de Donald Trump, et à Jared Kushner, le gendre du président américain, qui ont été dépêchés au Kremlin pour mener des négociations en début de semaine.

Cette remarque est particulièrement significative venant du président finlandais, dont le pays partage une longue frontière avec la Russie et a récemment rejoint l'OTAN. La Finlande, par son histoire et sa position géographique, possède une compréhension aiguë des enjeux sécuritaires liés à Moscou.

Le secrétaire général de l'OTAN également préoccupé

Même le chef de l'OTAN, Mark Rutte, aurait exprimé ses inquiétudes lors de cet échange. Selon la même source, il aurait déclaré : "Nous devons protéger Volodymyr", suggérant que le président ukrainien pourrait se retrouver isolé face aux pressions américaines et russes.

Cette déclaration du secrétaire général de l'Alliance atlantique est particulièrement révélatrice. Elle indique que les préoccupations concernant l'approche américaine ne sont pas limitées aux capitales nationales, mais s'étendent jusqu'aux institutions multilatérales censées incarner l'unité occidentale.

Des réactions prudentes et des silences éloquents

Sollicités par l'AFP pour commenter ces révélations, les différents acteurs concernés ont adopté des positions prudentes :

  • Les présidences française et finlandaise n'ont pas répondu dans l'immédiat
  • L'OTAN a gardé le silence sur ces allégations
  • La chancellerie allemande a refusé de commenter, invoquant le caractère confidentiel des échanges
  • Un conseiller du président ukrainien, Dmytro Lytvyn, a simplement déclaré ne pas "commenter les provocations"

Ces non-réponses et ces refus de commenter sont en eux-mêmes significatifs. Ils suggèrent que les propos rapportés pourraient bien être authentiques, mais que les acteurs concernés préfèrent éviter une confrontation publique avec Washington.

La crédibilité des sources

Der Spiegel affirme avoir parlé à deux participants à l'entretien téléphonique de lundi qui ont confirmé que les citations rapportées reflétaient fidèlement les propos tenus. Ces sources n'ont toutefois pas souhaité être identifiées, en raison du caractère confidentiel de l'appel.

L'hebdomadaire allemand, reconnu pour son sérieux journalistique, n'a pas identifié ses sources dans son article, une pratique courante pour protéger les informateurs dans des affaires diplomatiques sensibles. La confirmation par deux participants distincts renforce néanmoins la crédibilité de ces révélations.

Un plan de paix controversé et des perspectives incertaines

Les inquiétudes européennes s'inscrivent dans le contexte d'un plan de paix américain présenté en novembre dernier, qui avait été jugé très favorable à Moscou. Bien que cette version initiale ait été amendée depuis, aucune percée significative ne semble se profiler à l'horizon.

L'optimisme de Trump face au scepticisme européen

Donald Trump a néanmoins assuré mercredi que Vladimir Poutine voulait "mettre fin à la guerre" en Ukraine. Cette déclaration intervient au lendemain d'une "très bonne rencontre" à Moscou entre le président russe et Steve Witkoff, l'envoyé spécial américain.

Cet optimisme affiché par le président américain contraste fortement avec le scepticisme exprimé par les dirigeants européens. Pour ces derniers, les assurances de bonne volonté du Kremlin ne suffisent pas, et ils craignent que Washington ne soit prêt à accepter un accord qui sacrifierait l'intégrité territoriale de l'Ukraine.

La poursuite des négociations

Steve Witkoff devait rencontrer jeudi en Floride le négociateur ukrainien Roustem Oumerov. Cette rencontre sera scrutée de près par les capitales européennes, qui espèrent que les intérêts ukrainiens seront véritablement pris en compte dans les discussions.

Les prochains jours seront cruciaux pour déterminer si les craintes européennes sont fondées ou si l'administration Trump parviendra à rassurer ses alliés sur ses véritables intentions. La cohésion du camp occidental face à l'agression russe en dépend largement.

Cette crise de confiance transatlantique intervient à un moment critique du conflit ukrainien et pourrait avoir des répercussions durables sur l'architecture de sécurité européenne et sur les relations entre l'Europe et les États-Unis.