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Trump déploie l'ICE à La Nouvelle-Orléans contre les immigrés


Opération fédérale controversée dans la ville sanctuaire. La future maire démocrate Helena Moreno dénonce les méthodes et le profilage racial.

Trump déploie l'ICE à La Nouvelle-Orléans contre les immigrés

Le président américain Donald Trump intensifie sa politique migratoire avec le déploiement de la police de l'immigration à La Nouvelle-Orléans. Cette opération, lancée mardi par le ministère de la Sécurité intérieure, cible officiellement les immigrés sans papiers présentés comme des "criminels", provoquant l'inquiétude des autorités démocrates locales qui dénoncent une atteinte aux droits fondamentaux.

La future maire démocrate de la ville, Helena Moreno, exprime ses préoccupations face à cette intervention fédérale qui s'inscrit dans une stratégie nationale plus large de lutte contre l'immigration clandestine, priorité absolue de l'administration Trump.

Une opération controversée dans une ville "sanctuaire"

Le déploiement de l'ICE à La Nouvelle-Orléans

Le ministère américain de la Sécurité intérieure a lancé mercredi une vaste opération d'arrestations d'immigrés en situation irrégulière dans les rues de La Nouvelle-Orléans. Cette intervention de la police fédérale de l'immigration (ICE) vise spécifiquement ce que l'administration Trump qualifie de "criminels en liberté", reprochant directement aux autorités démocrates de la ville leur manque de coopération.

La ministre de la Sécurité intérieure, Kristi Noem, a justifié cette opération en affirmant sur le réseau social X qu'elle permettrait de "chasser les pires des pires de La Nouvelle-Orléans". Un photographe de l'AFP présent sur place a pu documenter plusieurs arrestations, dont certaines se sont déroulées dans une atmosphère particulièrement tendue.

La politique de "sanctuaire" remise en cause

Le ministère de la Sécurité intérieure met directement en cause la politique de sanctuarisation mise en œuvre par les autorités démocrates de La Nouvelle-Orléans. Ces politiques, adoptées par de nombreux États et villes dirigés par les démocrates à travers le pays, consistent à limiter strictement la collaboration entre les forces de l'ordre locales et les agents de l'ICE.

L'objectif de ces mesures est de protéger les immigrés en situation irrégulière des menaces d'expulsion, en créant un environnement où ils peuvent vivre, travailler et signaler des crimes sans craindre d'être livrés aux autorités fédérales de l'immigration. Cette approche entre en collision frontale avec la stratégie répressive de l'administration Trump.

L'annonce d'un déploiement militaire imminent

Au-delà de l'intervention de la police de l'immigration, le président Donald Trump a réitéré mardi son intention d'envoyer des militaires de la Garde nationale à La Nouvelle-Orléans. Cette décision s'inscrit dans une série de déploiements similaires effectués dans d'autres grandes villes américaines comme Los Angeles, Washington et Memphis, systématiquement contre l'avis des autorités locales démocrates.

Trump affirme avoir reçu un appel du gouverneur républicain de Louisiane, Jeff Landry, qui aurait demandé cette aide fédérale. "Il a demandé de l'aide à La Nouvelle-Orléans et nous serons là-bas dans environ deux semaines", a déclaré le président américain, justifiant ces renforts par la nécessité de lutter contre la criminalité et d'appuyer la police fédérale de l'immigration.

Les inquiétudes de la future maire démocrate

Helena Moreno, qui doit prendre ses fonctions de maire début janvier, exprime une position nuancée mais critique face à cette opération. Si elle reconnaît la nécessité d'éloigner les criminels violents des rues, elle dénonce fermement les méthodes employées par l'ICE.

"Est-ce qu'on veut les criminels les plus violents en dehors de nos rues? Absolument", a déclaré l'élue démocrate. "Mais ce que nous avons vu à travers le pays et dans d'autres villes, c'est que la police de l'immigration semble viser les personnes de couleur et viole peut-être leurs droits à une procédure en bonne et due forme", a-t-elle ajouté, pointant du doigt un profilage racial potentiel.

La lutte contre l'immigration, priorité absolue de Trump

Le président Trump a érigé la lutte contre l'immigration clandestine en priorité absolue de son administration. Son discours politique évoque régulièrement une "invasion" des États-Unis par des "criminels venus de l'étranger", une rhétorique qui alimente ses communications abondantes sur les expulsions d'immigrés.

Le gouvernement Trump établit systématiquement un lien direct entre criminalité et immigration clandestine, assurant viser exclusivement "les pires des pires" immigrés ayant commis des crimes graves. Cette narration officielle justifie les opérations d'envergure menées par l'ICE à travers le pays.

Des statistiques qui contredisent le discours officiel

Pourtant, des données non publiées de l'ICE, obtenues par des experts du Cato Institute, une organisation de tendance libertarienne, dressent un tableau bien différent de la réalité. Selon ces statistiques, seules 5% des personnes détenues par la police de l'immigration depuis le début de l'année fiscale le 1er octobre ont été condamnées pour des actes de violence.

Plus révélateur encore, près de 70% des personnes arrêtées n'ont aucune condamnation à leur actif. Ces chiffres remettent sérieusement en question l'affirmation selon laquelle les opérations de l'ICE cibleraient prioritairement les criminels dangereux.

Le ministère de la Sécurité intérieure conteste vigoureusement ces statistiques, avançant ses propres données selon lesquelles "70% des arrestations effectuées par ICE concernent des étrangers en situation irrégulière criminels accusés ou condamnés pour infractions aux États-Unis". Cette divergence dans les chiffres souligne l'importance de la méthodologie utilisée et de la définition du terme "criminel".

Le précédent de Chicago et l'intervention judiciaire

À Chicago, dans le nord du pays, une opération similaire a donné lieu à une intervention judiciaire remarquée. En novembre, un juge fédéral a ordonné la libération sous caution de plus de 400 personnes arrêtées par l'ICE, estimant qu'elles ne présentaient pas de risque pour la sécurité publique.

Cette décision judiciaire, qui constituait un revers significatif pour la politique migratoire de Trump, a toutefois été suspendue après que le gouvernement ait fait appel. L'audience devant la cour d'appel s'est tenue mardi, mais celle-ci n'a pas encore rendu son verdict, laissant dans l'incertitude le sort de ces centaines de personnes.

Un bras de fer politique et juridique qui s'intensifie

L'opération à La Nouvelle-Orléans illustre le bras de fer croissant entre l'administration fédérale républicaine et les autorités locales démocrates sur la question migratoire. Ce conflit oppose deux visions radicalement différentes:

  • D'un côté, une approche répressive privilégiant les expulsions massives et l'application stricte des lois sur l'immigration
  • De l'autre, une politique de protection des immigrés considérés comme membres à part entière de la communauté locale

Cette confrontation soulève des questions fondamentales sur l'équilibre des pouvoirs entre autorités fédérales et locales, sur les droits des immigrés et sur la définition même de la sécurité publique. Les prochaines semaines, avec l'arrivée annoncée de la Garde nationale à La Nouvelle-Orléans, promettent d'intensifier encore ces tensions politiques et sociales qui divisent profondément le pays.

L'issue de ce conflit pourrait établir des précédents juridiques importants et influencer durablement la politique migratoire américaine, alors que les tribunaux deviennent le champ de bataille où se joue l'avenir de milliers d'immigrés vivant aux États-Unis.