Dans un geste sans précédent pour un géant de la grande distribution américaine, Costco vient de franchir le pas en attaquant frontalement la politique douanière de l'administration Trump. Le groupe de supermarchés, connu pour ses entrepôts à prix réduits, a déposé une plainte officielle contestant la légalité des droits de douane imposés par le président américain, marquant ainsi une escalade dans le conflit commercial qui oppose désormais de grandes entreprises américaines à leur propre gouvernement.
Cette action en justice, déposée le 28 novembre auprès du Tribunal de commerce international de New York, représente un tournant majeur dans la contestation judiciaire de la politique commerciale trumpiste. Costco devient ainsi le premier grand groupe américain à rejoindre officiellement le combat juridique initié par plusieurs États démocrates et petites entreprises contre ces mesures protectionnistes controversées.
Une plainte historique contre les surtaxes douanières
La démarche de Costco s'inscrit dans un contexte juridique déjà tendu autour de la politique douanière américaine. Le groupe ne se contente pas de contester la légalité des taxes, mais demande également le remboursement intégral des surtaxes qu'il a dû acquitter depuis la mise en place de ces mesures au début du mandat présidentiel. Bien que le montant exact réclamé ne soit pas précisé dans la plainte consultée par l'AFP, il pourrait s'agir de sommes considérables compte tenu du volume d'importations géré par le géant de la distribution.
L'argument principal de la plainte repose sur une question constitutionnelle fondamentale : selon les plaignants, ces droits de douane indiscriminés violent la Constitution américaine, qui confère théoriquement au Congrès, et non au président, le pouvoir de taxation. Cette interprétation a déjà trouvé un écho favorable auprès de plusieurs instances judiciaires.
Un précédent judiciaire encourageant pour les plaignants
Avant l'action de Costco, plusieurs États démocrates et petites entreprises avaient déjà emprunté la voie judiciaire avec un certain succès. Le Tribunal de commerce international et la Cour d'appel ont effectivement donné raison aux plaignants sur le fond, reconnaissant le bien-fondé de leurs arguments constitutionnels. Toutefois, ces juridictions ont maintenu temporairement les surtaxes douanières en vigueur, le temps que l'affaire soit définitivement tranchée par la plus haute instance du pays.
Lors d'une audience qui s'est tenue début novembre, la Cour suprême américaine a manifesté un certain scepticisme quant à la légalité d'une partie substantielle de ces droits de douane. Cette position des juges suprêmes a probablement encouragé Costco à franchir le pas et à déposer sa propre plainte, anticipant une possible décision favorable.
Une stratégie préventive pour sécuriser les remboursements
La motivation de Costco à agir maintenant s'explique par une préoccupation stratégique majeure. Selon les termes de la plainte, le groupe craint que même si la Cour suprême déclarait les droits de douane illégaux, les sommes déjà versées au fisc américain ne soient pas automatiquement remboursées. En déposant une plainte dès maintenant, Costco s'assure une base juridique solide pour réclamer ces remboursements le moment venu.
Cette approche préventive témoigne d'une gestion prudente des risques financiers et juridiques. Le groupe anticipe ainsi différents scénarios et se positionne favorablement pour récupérer des montants potentiellement considérables qui pèsent sur sa rentabilité et celle de ses fournisseurs.
Un mouvement qui s'étend au-delà de Costco
Costco n'est pas seul dans cette bataille juridique. Plusieurs autres entreprises ont déposé des plaintes similaires contre l'administration Trump, parmi lesquelles des filiales américaines de groupes étrangers tels que le constructeur automobile japonais Toyota. Cette multiplication des actions en justice révèle l'ampleur du mécontentement du monde des affaires face à ces mesures protectionnistes.
Néanmoins, Costco se distingue comme étant, jusqu'à présent, le plus important groupe américain à poursuivre en justice l'administration Trump sur cette question. Cette prise de position d'un acteur majeur de l'économie américaine pourrait encourager d'autres grandes entreprises à suivre le mouvement et à contester officiellement ces politiques douanières.
Les limites de la contestation judiciaire
Il est important de noter que toutes les taxes douanières ne sont pas visées par ces plaintes. Les droits de douane dits sectoriels, qui ciblent spécifiquement certaines industries comme l'automobile, l'acier et l'aluminium ou le cuivre, n'ont pas été inclus dans les contestations juridiques. Cette distinction suggère que certaines mesures douanières pourraient être considérées comme plus légitimes ou mieux fondées juridiquement que d'autres.
Cette approche sélective dans les contestations reflète la complexité du paysage commercial américain et la nécessité pour les entreprises de choisir soigneusement leurs batailles juridiques en fonction de la solidité de leurs arguments constitutionnels.
Les droits de douane, outil politique de Trump
Pour comprendre l'ampleur de cette confrontation juridique, il faut replacer ces droits de douane dans le contexte plus large de la politique de Donald Trump. Le président américain a fait des surtaxes douanières une pierre angulaire non seulement de sa politique commerciale, mais également de sa diplomatie internationale.
Ces mesures sont utilisées à des fins multiples :
- Rééquilibrer les échanges commerciaux des États-Unis avec le reste du monde selon la vision trumpiste
- Exercer une pression sur les pays voisins, notamment le Canada et le Mexique
- Forcer ces nations à renforcer leur lutte contre le trafic de drogue transfrontalier
- Contraindre les partenaires commerciaux à mieux contrôler les flux migratoires illégaux
Cette instrumentalisation des droits de douane à des fins politiques et diplomatiques explique en partie pourquoi ces mesures suscitent autant de controverses, tant sur le plan économique que constitutionnel. Les entreprises comme Costco se retrouvent ainsi prises entre les objectifs politiques de l'administration et leurs propres impératifs économiques.
L'issue de cette bataille juridique pourrait avoir des répercussions considérables non seulement pour Costco et les autres plaignants, mais pour l'ensemble du système commercial américain et l'équilibre des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif en matière de politique commerciale. La décision finale de la Cour suprême sera scrutée de près par l'ensemble du monde des affaires américain et international.











