Le célèbre couturier allemand Karl Lagerfeld a restauré méticuleusement une maison pour n'y passer sans doute qu'une seule nuit. Cette propriété, désormais mise aux enchères, témoigne de l'amour du créateur pour l'architecture et le design.
Demeure à l’abri des regards, lieu de réception et havre de création : une propriété francilienne ayant appartenu au célèbre couturier allemand Karl Lagerfeld jusqu’à sa mort en 2019 va être vendue mardi aux enchères notariales. Acheté en 2010 par Lagerfeld, le «Domaine de voisins» situé à Louveciennes (Yvelines), surnommé «la villa en dehors de Paris» par l’icône de la mode, sera mis en vente à un prix de départ de 4,6 millions d’euros.
Ambassade du style Lagerfeld
Un cadre idyllique pour la créativité
Un parc de 2 hectares renferme trois maisons distinctes, une piscine et un court de tennis, entourés «d’arbres ou de murs» assurant «discrétion et anonymat», souligne Jérôme Cauro, notaire à l’étude Arias chargée de la vente. Principale bâtisse, la «maison du maître», comme l’appelle Jérôme Cauro, est classique à l’extérieur, sobre à l’intérieur. L’absence de mobilier lors de la visite, à laquelle l’AFP a participé, n’aide pas à se projeter dans l’atmosphère du couturier.
Un écrin pour le mobilier de Lagerfeld
Quelques clichés publiés dans un livre de Marie Kalt et Patrick Mauriès sur les décors des propriétés de Karl Lagerfeld révèlent des meubles de créateurs, des affiches publicitaires allemandes collectionnées par le couturier et d’innombrables étagères de livres. «C’est une propriété qui a été l’écrin de son mobilier», explique Arno Felber, également notaire à l’étude Arias. «Il a tout mis dans cette dernière maison, il l’aimait vraiment beaucoup. Il l’appelait «la vraie version de lui-même», confiait en 2021 à «Vogue» sa muse et bras droit Amanda Harlech.
Une maison aux multiples usages
L’ancien directeur artistique emblématique de Chanel avait même fait reproduire sa chambre d’enfant dans une petite pièce aux murs tapissés d’un tissu léopard. Rien n’est certain cependant sur les habitudes de Karl Lagerfeld dans cette maison. La légende dit qu’il n’y aurait dormi qu’une seule nuit, qu’il aurait accueilli une grande réception en l’honneur de la princesse Caroline de Monaco ou encore qu’il la prêtait volontiers à ses amis.
«Il aimait y venir la journée pour créer et il aimait recevoir», croit savoir Jérôme Cauro. Les trois salons et la cuisine, dotée de quatre fours, cinq éviers, deux frigos et deux friteuses, sont en effet dimensionnés pour des dîners de 100 personnes. L’atelier de Karl Lagerfeld occupait une grande partie du 1er étage de la demeure de 600 m², où il avait installé des voilages sur chaque fenêtre et s’éclairait de lumières très blanches, comme il en avait l’habitude dans ses ateliers. De ses phases de création restent quelques pots carrés de peinture laissés dans un tiroir.
Des travaux colossaux pour une propriété historique
Selon l’étude notariale Arias, la légende de la mode a réalisé des «travaux colossaux» dans cette propriété qui a appartenu au poète Leconte de Lisle et à des membres de la famille Rothschild dans la première moitié du XIXe siècle. «On n’a pas de facture, mais on estime que le montant des travaux est proche du montant de mise à prix» de 4,6 millions, indique Arno Felber.
Tous les bâtiments ont été rénovés et modernisés avec un soin du détail qui est allé jusqu’à la peinture des prises électriques et au choix d’extincteurs au design argenté pour ne pas jurer avec la décoration. Laissée à l’abandon après le décès du «Kaiser», la maison a été rachetée en 2023 par une foncière qui a repris son entretien et l’a remise en vente. Jérôme Caudo assure avoir eu «des contacts avec des familles» et pense que le bien peut aussi intéresser des acteurs de l’événementiel ou des sociétés.