Près d’une semaine après le lancement des frappes américaines sur des sites nucléaires iraniens, les déclarations contradictoires fusent de toutes parts et de nombreuses interrogations demeurent sur l’efficacité réelle de la guerre de 12 jours. Le conflit a été déclenché le 13 juin par Israël avec l’objectif affiché d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire, une ambition que Téhéran dément nourrir. Voici ce qui s’est dit ces derniers jours sur le sujet:
Imbroglio autour de l’impact des frappes américaines en Iran
Un «succès historique» selon les États-Unis
Excédé par les débats incessants, le chef du Pentagone Pete Hegseth a décidé jeudi de mettre les points sur les i. «Grâce à une action militaire décisive, le président (Donald) Trump a créé les conditions pour mettre fin à la guerre. En décimant, anéantissant, détruisant – choisissez le mot – les capacités nucléaires iraniennes», a-t-il martelé, s’emportant contre les médias. Pour lui, c’est un «succès historique» qui ne devrait pas prêter à polémique.
Selon le chef d’État américain, vantant «une réussite militaire spectaculaire», le programme nucléaire iranien a été retardé de «plusieurs décennies». Et face aux questions sur le sort du stock d’uranium enrichi à 60%, qui pourrait en théorie servir à fabriquer plus de neuf bombes atomiques si le taux était porté à 90%, il assure que «rien n’a été évacué» des lieux avant les frappes. Il a reçu l’appui du directeur de la CIA John Ratcliffe: selon «des informations crédibles», «plusieurs infrastructures nucléaires clés de l’Iran ont été détruites et leur reconstruction devrait prendre plusieurs années».
Des avis plus prudents au sein du camp américain
Mais au sein même de son camp, d’autres avis plus prudents se sont fait entendre. D’après un document classé secret-défense dévoilé mardi par CNN, les frappes auraient scellé les entrées de certaines installations sans détruire les bâtiments souterrains, retardant le programme de seulement quelques mois. Un rapport «tout à fait erroné», a rétorqué la Maison Blanche. Dans le même sens, Israël a reconnu qu’il était «encore tôt» pour évaluer les résultats de l’opération.
La réaction iranienne
En face, le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a relativisé jeudi l’impact des frappes dans sa première apparition publique depuis la fin du conflit, estimant que Donald Trump avait «exagéré» leur efficacité.
«La partie n’est pas terminée», avait lancé auparavant l’un de ses conseillers, Ali Shamkhani. «Les matériaux enrichis, le savoir-faire et la volonté politique restent». Le gouvernement a dit avoir «pris les mesures nécessaires» en amont afin de «protéger les équipements et la matière nucléaire».
Une grande incertitude entoure le sort des réserves d’uranium
Une grande incertitude entoure notamment le sort des réserves de plus de 400 kg d’uranium hautement enrichi, vues pour la dernière fois le 10 juin par les inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Le gendarme onusien du nucléaire réclame un accès aux sites mais les relations sont actuellement très tendues avec Téhéran.
Tous s’accordent, même Téhéran, sur le fait que les sites de Fordo, Natanz et Ispahan, visés par les bombardements, ont été considérablement endommagés. «Je crois qu’anéanti, c’est trop. Mais le programme a subi d’énormes dégâts», a répété jeudi sur la radio française RFI Rafael Grossi, directeur général de l’AIEA.
Il estime que les milliers de centrifugeuses, ces volumineuses et coûteuses machines servant à enrichir l’uranium, ne sont plus opérationnelles au vu de «la charge explosive utilisée et de leur extrême sensibilité aux vibrations». Toutes ne sont cependant pas répertoriées, certaines ayant été stockées dans des lieux inconnus ces dernières années alors que la coopération avec l’instance onusienne se dégradait, de l’avis des experts.
D’autres sites nucléaires restent par ailleurs intacts. Alors Donald Trump a-t-il raison de parler d’un impact de plusieurs dizaines d’années? «C’est vrai qu’avec ses capacités réduites, il sera beaucoup plus difficile à l’Iran de continuer» sur le même rythme. «Mais cette affirmation du président» est «subjective», répond Rafael Grossi, préférant évaluer les faits «sur le terrain».
Qui dit vrai?
La situation reste complexe et les avis divergent sur l'impact réel des frappes américaines en Iran. Les déclarations optimistes des responsables américains contrastent avec les évaluations plus prudentes de certains experts et les démentis iraniens. Seul le temps permettra de déterminer l'impact réel de ces frappes sur le programme nucléaire iranien.