Logo webradio media

Pedro Sánchez sous pression après un nouveau scandale de corruption


Le Premier ministre espagnol, fragilisé par la démission d'un proche collaborateur, doit apaiser ses alliés et faire face à l'opposition.

Pedro Sánchez sous pression après un nouveau scandale de corruption

Fragilisé après la démission d’un proche collaborateur pour corruption, le premier ministre espagnol Pedro Sánchez a exclu de démissionner mais il devra apaiser ses alliés au sein du gouvernement, passablement irrités, même s’il ne risque pas immédiatement d’être détrôné par l’opposition.

Le scandale a éclaté jeudi: un juge de la Cour suprême a révélé soupçonner le numéro trois du Parti socialiste (PSOE), Santos Cerdán, d’être impliqué dans un réseau de corruption attribuant des contrats publics en échange d’argent, une affaire dans laquelle l’ancien ministre et ex-bras droit du premier ministre, José Luis Ábalos, est déjà mis en cause.

Les défis de Pedro Sánchez face à la corruption

Un scandale de plus

C’est un énième coup dur pour Pedro Sánchez, qui devait déjà faire face à d’autres dossiers encombrants: son épouse, son frère et le procureur général, le plus haut magistrat du parquet espagnol, nommé par le gouvernement, sont notamment visés par des enquêtes judiciaires.

Réactions de l'opposition

Autant d’affaires qui poussent l’opposition de droite à réclamer encore et encore au leader socialiste, au pouvoir depuis 2018, de convoquer des élections générales, une prérogative exclusive du chef de l’exécutif.

«Pedro Sánchez ne peut pas rester en poste. La régénération de la vie publique espagnole impose» qu’il «démissionne», affirme vendredi dans son éditorial le journal conservateur «El Mundo». Le quotidien monarchiste ABC évoque de son côté «l’agonie» du premier ministre.

À l’appel du parti d’extrême droite Vox, près de 3000 personnes ont manifesté vendredi soir dans le centre de Madrid au cri de «Sánchez en prison», afin de pousser le chef du gouvernement à quitter le pouvoir.

La réponse de Pedro Sánchez

Pedro Sánchez, auteur d’une autobiographie intitulée «Manuel de résistance», a pourtant écarté clairement l’idée de convoquer des élections anticipées jeudi, lors d’une conférence de presse au siège du PSOE, se disant prêt à mener son mandat jusqu’au bout, en 2027, tout en demandant «pardon» aux Espagnols pour ce scandale.

Les tensions au sein de la coalition

Mais le problème pour le premier ministre réside dans ses partenaires au sein de la coalition gouvernementale, la plateforme de gauche radicale Sumar et de petits partis indépendantistes, qui vont lui demander des comptes.

«Il ne suffit pas de demander pardon», a mis en garde jeudi soir Yolanda Díaz, ministre du Travail et figure de Sumar, qui a réclamé un changement de cap du gouvernement. Junts per Catalunya, le parti de l’indépendantiste catalan Carles Puigdemont dont le soutien parlementaire a été déterminant pour l’investiture de Sánchez, a quant à lui demandé une «réunion urgente» avec les socialistes pour évaluer la «viabilité» de la législature.

Les options de Pedro Sánchez

Pour Paloma Román, politologue de l’Université Complutense de Madrid, «la seule option qu’il reste» à Sánchez pour poursuivre son mandat sera de se soumettre à un vote de confiance au Parlement. «Ce que Sánchez doit faire maintenant, c’est apaiser les critiques de ses partenaires, en leur donnant plus d’informations et en abordant la question de confiance», assure la chercheuse.

Une option que le gouvernement n’envisage pas pour l’instant. Le premier ministre doit «faire avancer son programme électoral, ne pas décevoir les millions de personnes qui ont voté pour lui», a justifié sur la radio Cadena Ser Óscar López, un ministre socialiste proche de Sánchez, éludant le sujet de la motion de confiance.

Le facteur extrême droite

Selon Paloma Román, pour le moment, Pedro Sánchez peut toutefois compter sur le fait que l’opposition ne dispose pas des soutiens nécessaires pour faire adopter une motion de censure au Parlement et précipiter sa chute.

De fait, Alberto Núñez Feijóo, leader du Parti populaire (PP, droite), le principal parti d’opposition, a exclu jeudi de déposer une telle motion, afin de ne pas donner «une bouffée d’oxygène» à Sánchez en cas d’échec. Il a plutôt appelé les alliés de Sánchez à réfléchir pour «sauver un peu de leur honneur» et éviter d’être «complices du plus grand torrent de corruption».

Mais il est peu probable que ses partenaires tournent le dos à Sánchez, car l’alternative serait un gouvernement du PP avec le soutien du parti d’extrême droite Vox, un épouvantail pour la gauche radicale comme pour les petits partis régionaux et nationalistes. Ils «ne veulent pas laisser tomber Sánchez, non pas parce qu’ils l’aiment beaucoup, mais parce que ce qu’ils ne veulent en aucun cas, c’est un gouvernement PP et Vox», conclut Paloma Román.

Pedro Sánchez devra donc naviguer entre les exigences de ses alliés et les pressions de l’opposition pour maintenir son gouvernement à flot et mener à bien son mandat.