Le crash d’un Boeing 787 Dreamliner de la compagnie Air India, qui a fait au moins 260 morts dont plusieurs au sol, place de nouveau l’avionneur américain sous les projecteurs au moment où il faisait état de progrès après une crise profonde et quelques jours avant un grand salon international près de Paris.
«Dans une semaine, il y aura probablement une ou deux hypothèses opérationnelles sur ce qu’il s’est passé», a commenté Nicolas Owens, analyste de Morningstar, relevant que les enquêtes sur des accidents aériens durent généralement «plusieurs mois».
La réaction des marchés était claire jeudi: l’action a perdu plus de 4% à la Bourse de New York. Celle de GE Aerospace, qui a fabriqué les deux moteurs du gros porteur accidenté, a reculé de plus de 2%. Mais, pour Nicolas Owens, l’accident ne devrait pas empêcher Boeing d’engranger au Bourget la semaine prochaine des commandes pour le 787 Dreamliner, entré en service en 2011.
Premier accident d’un 787
L’avion d’Air India, qui transportait 242 personnes, était exploité depuis début 2014. C’est le premier accident mortel de la famille du 787. «Il est très peu probable que les gens vont conclure qu’il y a un problème systémique avec le moteur ou l’avion», a anticipé l’analyste.
Même impression pour Richard Aboulafia, directeur de la société de conseil dans l’aérospatial AeroDynamic, qui souligne le fait que rien n’indique un problème de conception. «C’est une tragédie mais il est peu probable que cela affecte la perception du 787 parce qu’on ne sait rien à ce stade et il a un très bon passif», a-t-il expliqué.
Assistance
L’avionneur s’est rapidement engagé à apporter son soutien à l’enquête. «Nous sommes en contact avec Air India concernant le vol 171 et nous nous tenons prêts à les soutenir», a-t-il indiqué.
«Nos plus sincères condoléances aux proches des passagers et de l’équipage à bord du vol 171 d’Air India, ainsi qu’à quiconque touché à Ahmedabad», a réagi plus tard Kelly Ortberg, patron de Boeing, dans un communiqué distinct. Il a précisé avoir discuté avec Natarajan Chandrasekaran, président d’Air India, «pour lui offrir notre soutien total» et a assuré avoir une équipe «prête pour assister l’enquête» dirigée par les autorités indiennes.
Série de problèmes
Avant cet accident, il se préparait à vanter auprès du monde de l’aéronautique lors du grand raout de l’industrie les progrès de Boeing dans l’assainissement de sa production. Kelly Ortberg s’était félicité fin mai du récent feu vert du régulateur américain de l’aviation (FAA) à la hausse de la cadence mensuelle du 787 Dreamliner à sept, contre cinq actuellement. Son objectif est d’atteindre dix mensuels.
L’accélération de la production de ce modèle ainsi que du monocouloir 737 MAX – avion le plus vendu de Boeing – s’inscrit dans la stratégie des dirigeants pour retrouver une trajectoire saine. Le groupe a en effet été plongé dans une crise existentielle après un incident en vol en janvier 2024 sur un 737 MAX 9 de la compagnie Alaska Airlines.
Il s’agissait du dernier épisode d’une série de problèmes de qualité et de conformité sur les avions Boeing, et le premier sérieux depuis les crashes du 737 MAX 8 en 2018 et en 2019 (346 morts au total). Ces deux appareils avaient été livrés peu avant. Le constructeur a reconnu que le logiciel antidécrochage MCAS, qui présentait un problème de conception, avait été un facteur.
Le Dreamliner a aussi rencontré quelques écueils depuis son entrée en exploitation, principalement dus à des défauts de fabrication et d’inspection. Huit 787 ont notamment été temporairement cloués au sol à l’été 2020 et plus d’une centaine, qui n’avaient pas encore été livrés, ont nécessité un réusinage tout juste achevé.
L’avion a également été au cœur d’une audition au Sénat américain en avril 2024 lorsqu’un lanceur d’alerte a évoqué des défauts de fabrication sur le 787 et le 777, autre gros porteur de Boeing.