La cheffe de file de l’extrême droite en France, Marine Le Pen, jugée pour des soupçons de détournement de fonds publics européens, sera fixée le 31 mars sur son sort et son éventuelle inéligibilité. Son avocat a imploré mercredi le tribunal correctionnel de Paris de lui épargner «l’élimination politique». Triple candidate à la présidentielle (2012, 2017 et 2022), Marine Le Pen, jugée depuis le 30 septembre avec son parti et 24 autres prévenus, est menacée, si le tribunal suit le réquisitoire, de ne pas pouvoir se présenter aux prochaines élections. La peine s’appliquerait en effet immédiatement, même en cas d’appel.
La défense de Marine Le Pen plaide contre «l'élimination politique»
Des réquisitions sévères et controversées
Comme les avocats des autres prévenus et du RN avant lui, Me Rodolphe Bosselut a «plaidé la relaxe», après s’être attaqué à ce qui, au-delà d’une éventuelle condamnation, est l’enjeu principal pour sa cliente: cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire qu’a requise le parquet, avec une peine de cinq ans de prison dont deux ferme aménageables et 300'000 euros d’amende. Cette demande d’inéligibilité immédiate a rendu réelle la possibilité que Marine Le Pen ne puisse pas se présenter à la présidentielle de 2027.
«Ces réquisitions sont une arme de destruction massive du jeu démocratique», a tonné Me Bosselut. «Ça ne concerne pas que Marine Le Pen, ça concerne a minima 13 millions d’électeurs, voire l’ensemble du corps électoral, voire la sincérité du scrutin, ce n’est pas rien». Cette «sévérité» du parquet est «non justifiée, gratuite», une «demande d’élimination politique». Elle «jette un doute sur les intentions mêmes de l’institution judiciaire», accuse-t-il.
Réactions de Marine Le Pen
Au lendemain des réquisitions dont elle avait dénoncé la «violence» et «l’outrance», Marine Le Pen avait elle-même résumé: «C’est ma mort politique qu’on réclame».
Justifications du parquet
Le parquet a justifié ses réquisitions par le risque de «réitération» de détournements de fonds publics, qui s’étaient «répétés» pendant 12 ans et ne s’étaient «interrompus» qu’à cause du signalement du Parlement européen, qui a estimé son préjudice financier à 4,5 millions d’euros.
Quant aux prévenus ayant nié en bloc l’existence d’un «système» mis en place pour payer des assistants parlementaires «fictifs» avec l’argent européen, ils n’ont fait preuve d’aucune «remise en question», a accusé le parquet, soulignant que le parti avait déjà été condamné pour des faits de détournement de fonds.
Défense de Marine Le Pen
Marine Le Pen «est venue quasiment tous les jours avec l’envie de s’expliquer, de vous convaincre de sa totale bonne foi», a souligné son avocat. «Elle a répondu avec sérieux, sincérité à toutes les questions, n’en a éludé aucune, elle est restée plusieurs heures à la barre... On peut lui reprocher beaucoup de choses, mais pas d’avoir méprisé le tribunal ou l’institution judiciaire», soutient-il.
«Ce dont je voudrais convaincre le tribunal, c’est que la pratique parlementaire au Parlement européen de 2004 à 2016 reprochée à ma cliente et aux autres prévenus était non seulement banale, anodine, car partagée par tous les partis européens, mais exempte de toute intention frauduleuse car considérée comme admise».
Une pratique banale et anodine
La défense de Marine Le Pen insiste sur le fait que les pratiques reprochées étaient courantes et acceptées par tous les partis au Parlement européen. Cette argumentation vise à minimiser la gravité des accusations et à démontrer que les actions de Marine Le Pen et de son parti n'étaient pas frauduleuses.
L'affaire reste en suspens jusqu'à la décision du tribunal le 31 mars, date à laquelle le sort politique de Marine Le Pen sera scellé.