La Thaïlande a fermé temporairement samedi aux touristes thaïlandais et cambodgiens plusieurs points de passage avec le Cambodge, dont son plus important, sur fond des tensions avec son voisin, après la mort d’un soldat khmer lors d’un récent affrontement à la frontière. Ce soldat a été tué le 28 mai lors d’échanges de coups de feu dans un lieu connu sous le nom de «Triangle d’Emeraude», une zone frontalière commune entre le Cambodge, la Thaïlande et le Laos. Les armées thaïlandaise et cambodgienne ont convenu d’apaiser les tensions le jour suivant, mais Phnom Penh a décidé de maintenir ses troupes dans le secteur malgré les demandes de retrait de Bangkok.
Samedi, l’Armée royale thaïlandaise a pris le contrôle de l'«ouverture et fermeture» de tous les passages frontaliers avec le Cambodge, invoquant une «menace pour la souveraineté et la sécurité de la Thaïlande». Le pays compte actuellement 18 points de contrôle (checkpoints). Elle a notamment interdit le passage des camions à six roues et réduit les heures d’ouverture du poste-frontière d’Aranyaprathet-Poipet, le plus important avec le Cambodge, en précisant dans un communiqué que les Thaïlandais et les Cambodgiens ne pourraient désormais traverser que pour des raisons professionnelles et commerciales.
Menace pour la souveraineté
Restrictions aux points de passage
Plusieurs milliers de personnes traversent chaque jour ce poste-frontière, nombre étant des Thaïlandais allant jouer dans les casinos côté cambodgien. L’armée royale thaïlandaise a déclaré à l’AFP que les restrictions s’appliquaient uniquement aux citoyens des deux pays, mais que leur mise en œuvre «pouvait varier d’un endroit à l’autre». Six autres points de contrôle aux frontières ont réduit leurs heures d’ouverture et interdit les véhicules à six roues. Les autorités ont précisé que le commerce n’était pas affecté et que les travailleurs cambodgiens étaient toujours autorisés à entrer en Thaïlande.
Réactions politiques
Le vice-Premier ministre et ministre de la Défense Phumtham Wechayachai a jugé, samedi dans un communiqué, «profondément regrettable» que le Cambodge ait «rejeté» la proposition de retirer ses forces armées. Lundi, le Premier ministre cambodgien Hun Manet a annoncé que le royaume déposerait une plainte auprès de la Cour internationale de justice (CIJ) concernant leur vieux différend frontalier. Il a ajouté que le conflit frontalier était «attisé par de petits groupes extrémistes dans les deux pays», ce qui pourrait conduire à de nouveaux affrontements.
Différend de longue date
Le Cambodge et la Thaïlande s’opposent de longue date sur le tracé de leur frontière de plus de 800 kilomètres, défini en grande partie par des accords conclus durant l’occupation française de l’Indochine. En 2011, des affrontements autour du temple Preah Vihear, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco et revendiqué par les deux pays, avaient fait au moins 28 morts et des dizaines de milliers de déplacés. Si la CIJ a adjugé au Cambodge la zone contestée en contrebas du temple, en 2013, le tracé d’autres zones continuent d’opposer Bangkok et Phnom Penh. La Thaïlande a précisé qu’un Comité conjoint de délimitation des frontières se réunirait la semaine prochaine pour tenter de résoudre le problème.
Points clés du conflit
- Mort d’un soldat khmer le 28 mai dans le «Triangle d’Emeraude».
- Fermeture temporaire de plusieurs points de passage frontaliers.
- Restrictions sur les véhicules à six roues et réduction des heures d’ouverture des postes-frontières.
- Maintien des troupes cambodgiennes malgré les demandes de retrait de Bangkok.
- Dépôt d’une plainte par le Cambodge auprès de la CIJ.
- Réunion prévue du Comité conjoint de délimitation des frontières.
Ces mesures et réactions montrent la complexité et la sensibilité du conflit frontalier entre la Thaïlande et le Cambodge, qui continue de poser des défis diplomatiques et sécuritaires pour les deux pays.