Dans le box des accusés, un homme écoute attentivement le témoignage de sa fille. Il s’agit de Brahim Chnina, 52 ans, poursuivi pour avoir publié sur les réseaux sociaux des messages et des vidéos «haineuses» contre Samuel Paty. Nina, la fille de Brahim Chnina et élève de Samuel Paty, comparaît pour la seconde fois. En décembre dernier, elle a été condamnée à 18 mois de prison avec sursis probatoire pour dénonciation calomnieuse.
Le président Franck Zientara la prévient : «Cela ne vous interdit pas de parler avec franchise». Nina raconte alors comment elle a menti à ses parents pour justifier ses deux jours d’exclusion du collège. Élève dissipée et peu studieuse, elle a été exclue pour ses absences non justifiées et son comportement. Mais la version qu’elle livre à sa mère est bien différente.
Le mensonge et ses conséquences
Les débuts du mensonge
«Sous le coup de la panique et du stress, je lui ai dit que j’avais été à un cours et que j’étais pas d’accord, que le prof m’a exclue. Qu’on a vu des caricatures», dit-elle. Brahim Chnina ne perd pas de temps pour dénoncer sur les réseaux sociaux un professeur «voyou» qu’il cite nommément. Il est vite rejoint par le militant islamiste expérimenté Abdelhakim Sefrioui, également dans le box des accusés.
L'engrenage médiatique
Se présentant comme un «journaliste», Sefrioui fait une interview de Nina devant les portes du collège, soufflant les réponses au passage. La jeune fille, alors âgée de 13 ans, réitère ses mensonges. Avec son père, elle ira porter plainte au commissariat contre Samuel Paty.
La spirale incontrôlable
«Je me suis dit que quelqu’un allait m’arrêter dans mon mensonge mais personne n’a dit que je n’étais pas au cours. Je me suis dit que tout le monde me croyait (...) Je ne gérais plus mon mensonge», explique Nina. L’annonce de la mort de Samuel Paty ne changera rien à son entêtement.
Les aveux tardifs
Ce n’est que durant sa garde à vue, après 30 heures d’interrogatoire, que la jeune fille reconnaîtra enfin, mais trop tard, qu’elle a menti. Durant tout son témoignage, la jeune fille marque peu d’émotions... sauf quand elle parle de son père.
Les excuses de Nina
«Je tiens à m’excuser auprès de ma famille, de mes parents. À cause de mon mensonge, on se retrouve tous ici. Je tenais à m’excuser auprès de mon père (...) sans mon mensonge, personne ne serait là», sanglote-t-elle. «Je me servais de la naïveté et de la gentillesse de mon père (...) En aucun cas, il ne pouvait se dire que ce que je disais était faux». «Aujourd’hui, si une personne doit être condamnée, ce ne sont pas les personnes dans le box mais moi», répète Nina.
Réactions de l'avocate de la famille Paty
À la sortie de la salle d’audience, Me Virginie Le Roy, avocate de la famille Paty, s’étonne des revirements du témoin. «Il y a un an, elle indiquait que son père était responsable, que son père avait lancé une fatwa numérique et qu’elle avait été manipulée. Aujourd’hui, elle vient nous dire qu’elle est responsable de tout. Il ne faut pas se moquer du monde».