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Expulsé d'Allemagne, un migrant irakien raconte son retour difficile


Après une décennie de tentatives pour obtenir des papiers en Allemagne, Mohamed Jalal est expulsé et retourne en Irak. Un parcours semé d'embûches.

Expulsé d'Allemagne, un migrant irakien raconte son retour difficile

Après avoir tenté, pendant près d’une décennie, d’obtenir des papiers en Allemagne, Mohamed Jalal a été expulsé. Dans son Kurdistan d’Irak natal, c’est un retour à la case départ, dans le dénuement le plus total.

Comme lui, des milliers d’Irakiens et d’autres venus du sud de la Méditerranée sont refoulés d’une Europe qui durcit ses politiques migratoires, en pleine montée de l’extrême droite.

Le retour compliqué des migrants expulsés d'Europe

Des politiques migratoires de plus en plus restrictives

Pour encourager les retours, des pays européens engagent des partenariats avec l’Irak, au moment où ce pays renoue avec un semblant de normalité après des conflits à répétition. Ils investissent dans des programmes de réinsertion et de formation professionnelle.

Rentré à Ranya, une ville du nord de l’Irak, Mohamed Jalal s’est réinstallé avec son père âgé dans un appartement exigu. Dans la principale pièce à vivre, ils dorment sur de fins matelas de mousse posés à même le béton. «Si je pouvais retourner en Europe je le ferais. Si ma demande était acceptée, je serais en règle et je travaillerais dans un restaurant kurde, sans toucher d’allocations publiques», plaide-t-il. «Ici, je n’ai pas d’emploi», lâche M. Jalal, 39 ans.

Un parcours semé d'embûches

En 2015, il rejoint la Turquie, où une embarcation de fortune le transporte d’Izmir vers une île grecque. Ensuite Athènes, la Macédoine du Nord, la Serbie, la Croatie et enfin l’Allemagne. Logé dans un centre pour demandeurs d’asile, il recevait de l’État 300 euros par mois (279 francs suisses).

Parfois, se souvient-il, «j’allais à Nuremberg et Munich pour travailler au noir», généralement «deux ou trois mois» en hiver, quand les inspections du travail diminuaient. Après deux rejets de sa demande d’asile, il est renvoyé en Irak en janvier 2024. Il tente d’ouvrir une boulangerie, sans succès. Durant deux mois, il travaille sur un stand de falalel pour sept dollars par jours. Aujourd’hui, il vit grâce aux 150 dollars mensuels envoyés par des proches en Grande-Bretagne.

Des chiffres en hausse

Au dernier trimestre 2024, près de 125'000 citoyens non-européens ont reçu l’ordre de quitter un pays de l’Union européenne, 16,3% de plus que durant la même période en 2023. «Par principe, l’Allemagne rapatrie ceux qui doivent quitter le pays», a confirmé à «l’AFP» l’ambassade à Bagdad.

«Il n’y a pas de perspectives de résidence pour les gens qui, dans l’espoir d’une vie meilleure, entrent de manière irrégulière en Allemagne, mais n’ont pas besoin de protection», selon l’ambassade. En une décennie, rappelle-t-elle, Berlin «a accordé protection et refuge à des millions de personnes fuyant la guerre et les violences dans leur pays natal.»

Une stabilité relative en Irak

Après quatre décennies de conflits et les exactions du groupe Etat islamique (EI), qui ont provoqué des vagues de migrations, l’Irak, riche en pétrole, a retrouvé une relative stabilité. Même si persistent corruption endémique et politiques publiques défaillantes.

À Bagdad et à Erbil, l’agence de développement allemande GIZ gère des centres proposant aux exilés de retour formations professionnelles et accompagnement à la création d’entreprise.

Le programme est financé par les autorités allemandes, suisses et par l’Union européenne. Entre juin 2023 et mai 2024, ces centres ont «conseillé et soutenu» quelque 350 personnes, rentrées notamment d’Allemagne, de l’UE ou de la région, précise GIZ à «l’AFP».

Accords bilatéraux et partenariats

Des pays européens ont des accords bilatéraux «de retour et de réadmission» avec l’Irak et l’UE finalise avec Bagdad un partenariat similaire, indique à «l’AFP» son ambassadeur, Thomas Seiler.

«La migration illégale doit être enrayée», justifie-t-il. «La capacité (...) des villes et villages à recevoir et intégrer des migrants a depuis longtemps été atteinte, au moins dans certaines parties de l’UE».

  • 300 euros de l'État
  • 125'000 citoyens non-européens ont dû quitter l'UE
  • Programme financé par des pays européens
  • «La migration illégale doit être enrayée»