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Pollution persistante dans la vallée de l'Arve malgré les mesures


La vallée de l'Arve reste l'une des plus polluées de France, avec des niveaux de particules fines dépassant souvent les seuils réglementaires.

Pollution persistante dans la vallée de l'Arve malgré les mesures

Dans son chalet à 700 m d’altitude, Françoise Veyret a une vue «incroyable» sur le massif du Mont-Blanc, mais aussi sur un nuage de «poussières» qui recouvre souvent la vallée de l’Arve, une des plus polluées de France. «Dès qu’il fait beau, hop, il y a le brouillard», regrette la retraitée de 75 ans, installée depuis 45 ans à Domancy, un village situé légèrement au-dessus de cette vallée qui serpente entre Chamonix et Annemasse.

La brume épaisse blanchâtre, surnommée la «peuf» par certains Savoyards, résulte de l’accumulation des polluants dans l’air de la vallée coincée entre deux massifs montagneux, où se concentrent les activités humaines. «On s’en rend compte en fin de journée ou le matin quand on se lève», surtout par temps sec l’hiver, témoigne la retraitée.

Les causes de la pollution dans la vallée de l’Arve

Phénomène d’inversion de températures

En cause, le phénomène dit d’inversion de températures, lorsque l’air froid reste bloqué sous un air plus chaud, lequel forme un «couvercle» empêchant les polluants de se disperser en altitude. Principal coupable: le chauffage au bois, particulièrement utilisé dans les nombreux chalets l’hiver, suivi du transport routier très dense sur cet axe de circulation majeur entre la France et l’Italie, et les activités industrielles – notamment dans le secteur du décolletage.

Conséquences pour les habitants

Avec l’arrivée du froid, la concentration de particules fines dépasse régulièrement les seuils réglementaires européens, entraînant des mesures de restriction pour les habitants. Pendant ces pics de pollution, Evelyn Zetter, 74 ans et atteinte d’un cancer, ne va plus «se promener au lac» de Passy, en fond de vallée, suivant les recommandations des autorités.

Le problème des camions sur l’autoroute A40

Cette habitante de Sallanches blâme avant tout le passage des camions sur l’autoroute A40, dont le vrombissement résonne en continu près du lac. Elle relate les embouteillages récurrents avec des «files de camions» à l’approche du tunnel du Mont-Blanc, qu’empruntent en moyenne 4500 véhicules par jour dont 1400 poids lourds, entre la France et l’Italie.

L’autoroute est aussi indispensable aux habitants qui travaillent en Suisse et à ceux qui peinent à se loger près de leur lieu de travail, à cause de la flambée des prix de l’immobilier dans les villes touristiques.

Mesures prises par l’État et les collectivités

Alertés, l’État et les collectivités ont mis en place le Plan de protection de l’atmosphère de la vallée de l’Arve en 2010, qui a acté l’interdiction des cheminées à foyer ouvert depuis 2022 ou la limitation de la vitesse à 110km/h sur l’A40 l’hiver. «Nous sommes précurseurs parce que nous étions dans une situation particulièrement préoccupante», explique Emmanuelle Dubée, préfète de Haute-Savoie, qui se félicite d’une légère baisse des émissions constatée sur quinze ans.

Efforts des habitants

Selon les associations locales, la petite amélioration de la qualité de l’air est due aux habitants qui ont «réfléchi par eux-mêmes» et ont modifié «leurs habitudes». «La plupart des gens ont changé leur système de chauffage», assure Jean-Claude Louis, «premier» habitant de Passy à avoir installé ses propres panneaux solaires. Si Françoise n’utilise pas sa cheminée, elle constate que nombre de ses voisins se chauffent encore au bois. «Ils ne changeront pas. Ce sont des vieilles habitudes...» Pour sa part, elle utilise du fioul, également émetteur de polluants.

Chiffres alarmants et condamnation de l’État

Ces efforts mitigés se traduisent dans des chiffres encore alarmants: en 2024, à Passy, le seuil d’alerte pour la pollution aux particules très fines (PM 2,5), particulièrement dangereuses pour la santé, a été dépassé 38 jours. Pour la première fois, en février, la justice a condamné l’État à verser 9000 euros à une famille de la vallée de l’Arve, au motif que les pathologies respiratoires de leur fils «ont été aggravées par la pollution». Pour la cour d’appel de Lyon, l’État a commis une «faute» du fait «de l’insuffisance des mesures adoptées».

Files de camions

Les files de camions sur l’autoroute A40 sont un problème majeur contribuant à la pollution de la vallée de l’Arve. Les embouteillages récurrents et le passage constant de poids lourds aggravent la situation, malgré les efforts des autorités pour limiter la vitesse et réduire les émissions.

«Vieilles habitudes»

Les «vieilles habitudes» des habitants, notamment l’utilisation du chauffage au bois, restent un obstacle significatif à l’amélioration de la qualité de l’air. Bien que certains aient adopté des systèmes de chauffage plus écologiques, beaucoup continuent de se chauffer au bois, contribuant ainsi à la persistance de la pollution.